Le Fastnet. Voilà un nom qui sonne bien.
Le Fastnet Rock. Un nom emblématique, une destination magique.Toucher du doigt les vertes collines irlandaises…
Après une transat incroyable en tant que mediaman sur un 60 pieds Imoca entre New-York et Les Sables d’Olonne, j’ai à peine eu le temps de débarquer que j’étais déjà reparti.
Mise à l’eau du bateau, convoyage vers Douarnenez, avitaillement, contrôles sécurité, briefings, prologue…et nous voilà partis.
Cette fois-ci en double avec Arthur Pénet, futur ministe et ami Concarnois. En route vers l’Irlande !
Dimanche 19h, nous sortons de la baie de Douarnenez au près, puis en abattant après la première marque de parcours, vent de travers sous gennaker nous passons le chenal du four et ses dangers.
Nous suivons cette longue guirlande lumineuse des feux de mât qui s’étire au fil de la nuit.
Des premiers abandons sont signalés à la radio. Le vent monte. La mer se creuse. Nous rentrons dans la Manche.
Combinaison sèche sur le dos, je vais passer la nuit à la barre à surfer à 12nds de moyenne.
Les vagues éclatent et submergent le bateau. Je prends un premier ris dans la grand-voile. Le bateau file toujours aussi vite, rebondit, tape. Une vague me prend de travers et me fait tomber dans le cockpit. Un poisson me frappe l’épaule.
Le jour se lève enfin. Ambiance grise, humide. Brouillard anglais. Le phare de Wolf Rock à babord.
Le vent se calme un peu.
On retrouve des camarades de jeu. Le bateau marche bien, l’équipage est en forme.
Le vent est au 270°, un vent d’Ouest tranquille pour faire du près vers la pointe Ouest de l’Irlande.
Le vent doit adonner dans les prochaines heures, on décide de rester sur cette amure et de ne pas faire de contre-bord…ça s’appelle faire une cuillère, tourner avec la bascule du vent.
Le coucher de soleil est incroyable, une lune de pirate nous accompagne toute la nuit ainsi que les premiers dauphins anglophones, forts sympathiques !
Deuxième matin, nous sommes toujours sur le même bord. Plus personne à nos côtés.
Je fais un petit contre-bord pendant 2 heures. Puis je reprends confiance dans notre option « cuillère » en virant à nouveau.
En approche de Kinsale, je découvre avec étonnement mes premières plate-forme pétrolières.
Mon mal de mer légèrement présent depuis 24h se calme un peu.
Avec Arthur, nos quarts fonctionnent bien, je fais des siestes de 2h.
Vers 18h nous apercevons enfin la côte irlandaise qui se découpe à l’horizon.
Il nous manque quelques degrés pour passer la bouée qui nous protège des éperons rocheux du belliqueux Staggs Rocks. Nous poussons au maximum ce bord en nous rapprochant des falaises de Castle Haven.
Une bande de mini surgit alors du sud, et là c’est un regroupement improbable après 2 jours de mer.
Une dizaine de Minis en file indienne vers le phare du Fastnet.
2 concurrents à 10 mètres de notre tableau arrière au passage de la bouée. Génial.
Et puis là tout le monde se réveille. La VHF frétille. Entre blagues, chansons irlandaises, envies de fish&chips et de Guinness.
Le vent a molli et au près mon fidèle bateau remonte les concurrents les uns après les autres.
Nous passons le Fastnet la nuit tombée en tête de notre petit groupe, bord à bord avec JJ et Thibault les copains de Concarneau. Chouette souvenir !
Cap au sud dans 18nds de vent. Toujours au près. Nous réglons bien les voiles, on distance légèrement le groupe.
La nuit est longue. Le jour arrive enfin, le vent a légèrement tourné, suffisamment pour renvoyer de la toile. Je sors le gennaker. Ce fichu gennaker. Un peu fatigué je bataille avec lui pour le mettre en place. Mais ça valait le coup ! Sous pilote automatique, le bateau avale les milles.
Et puis en début d’après-midi, la dorsale anticyclonique arrive enfin. Pétole soleil mer plate.
Mon 742 aime bien ces conditions. Je décide d’envoyer le grand spi.
On glisse tranquille durant cette 4ème nuit. On est contents de rentrer à la maison.
Un peu trop tranquille même. On ne voit plus personne à l’AIS. On n’entend plus rien à la VHF.
Les feux de mâts des collègues ont disparu.
On se dit que c’est bon signe. Que l’on avance bien. Et c’est en parti le cas.
Mais c’est surtout le fait (et on nous l’apprendra qu’à l’arrivée au ponton) que nous avons complètement oublié un waypoint, une bouée virtuelle à laisser à babord.
Du coup nous sommes toute la matinée plus nord que tout le monde, plein vent arrière, direction Ouessant. On commence à croiser des cargos, mais bon on se dit que c’est normal dans ce coin là.
En fait, nous sommes en plein milieu du DST, la zone de séparation de trafic réservée aux cargos et autres tankers…
Nous n’avions sorti que la carte d’approche de Ouessant sur laquelle le DST n’est pas visible…
Le phare du Créach sur Ouessant s’approche, puis de la Jument…toujours vent arrière, on avance pas vraiment…on se tâte pour empanner mais ça rajouterait pas mal de route…on maintient le cap.
On se rend compte qu’en fait le courant est contre nous, il lève des vagues étranges, magnétise l’eau…
A l’approche des Pierres Noires nous devons empanner, on retrouve des camarades de jeu qui arrivent du sud. Plus lofés et donc plus rapides que nous.
La lumière du jour s’affaisse sur la presq’île de Crozon, le cap de la Chèvre nous tend ses bras.
Dernier empannage pour rentrer dans la baie de Douarnenez. Juste derrière nous il y a Etienne, un copain de Concarneau avec son grand spi blanc.
Le coucher de soleil est magique. Nous glissons dans la baie à 9nds vers la ligne d’arrivée.
Il fait nuit quand nous touchons le ponton. Nous sommes heureux de retrouver la terre. Heureux d’avoir été là-haut. Un parcours génial !
Alors forcément, c’est un peu la douche froide quand j’apprends que l’on a oublié la marque et coupé le DST. Je m’en veux terriblement de ne pas avoir été assez rigoureux sur la cartographie… Je paye clairement ici ma préparation tardive et mon enchaînement avec la transat, qui, même si elle m’a bien amariné, m’a quand même bien fatigué.
Au final, après passage devant le jury, je m’en sors avec 20h de pénalité.Cela aurait pu être bien pire.
Je termine dernier de la course et c’est normal. Mais je suis heureux de valider cette course et d’avoir désormais mes milles en course pour mon inscription à la Mini-Transat 2017.
C’était une super course, une belle aventure, un parcours génial. C’était mon Mini-Fastnet 2016.
Stan.