Jeudi 8 juin 2017.
Il est 13h10. Je me fais remorquer pour sortir du port de Tréboul.
Je suis le premier concurrent à sortir dans la baie de Douarnenez.
Le ciel est chargé. Des grains gris passent. Une longue houle résiduelle nous rappelle que dehors ça bouge encore.
Drôle de sensation de se dire que c’est ici, en 2013, que j’ai eu envie de faire du mini en voyant partir la Mini-Transat.
Et là aujourd’hui c’est ma dernière course avant la Mini.
Je suis assez fier de voir le chemin parcouru depuis.
15h. Le départ est donné il y a 20nds de vent. Un vent de sud irrégulier perturbé par les collines de la pointe du Raz. Départ prudent, je sors au milieu du peloton. On part au près face au vent, en route directe sur le raz de Sein.
La pluie passe et fouette le visage. Les cailloux du raz se dessinent dans le brouillard lointain.
Et puis nous y voilà.
Il y a bien 3m de creux. Les minis font des bonds, et disparaissent au creux des vagues.
Sentiment mêlé d’excitation, de plaisir du spectacle, mais aussi une légère inquiétude. Il faut rester concentré.
Le courant est avec nous. On s’éloigne du raz au près. Un virement et on aura le bon angle pour aller sur Penmarch.
Ça matosse, ça vire, ça secoue, mais ça passe.
L’élastique s’est tendu et je ne vois plus les premiers.
Mais je suis au contact avec mes concurrents et amis habituels : Martin, François, Slobodan, Elodie,…
Le vent se calme un peu, les nuages gris s’évacuent.
Je mange un plat chaud, envoie mon petit spi, et regarde le soleil couchant en même temps.
Passé Penmarch, je peux abattre encore plus, j’envoie le spi medium, je lofe plus que mes camarades pour faire de la vitesse, il y a entre 13-18nds de vent.
Je fais une première sieste.
La pleine lune est là. le plan d’eau est lisse, ça glisse en descente vers l’île de Groix.
En 2 empannages, je me retrouve sous Groix. Je frôle la côte et ses balises.
J’avance un peu moins vite, mais je fais moins de route.
Je double quelques bateaux. Direction le phare des Birvideaux.
Le jour se dessine lentement. Affalage du spi devant le phare, ça ressort au près.
Mais l’angle au vent ne permets pas de passer Groix en la laissant à tribord.
Je fais un premier contre-bord avant de me recaler en tribord amure.
Mon bateau marche bien au près sous pilote. J’en profite pour dormir.
Ce bord va être long.
Petit jus de fruit, petits biscuits, chaleur du soleil au réveil.
Je suis songeur et un peu blasé par ce bord de près.
Je dors sur le pont.
Les Glénan s’approchent, mais il reste encore 40 milles vers la chaussée de Sein.
Le temps est parfois long mais il passe toujours.
Je perds 2 places en tirant un contre-bord pour éviter des roches au sud des Glénan.
Je passes sous gennaker dans la baie d’Audierne.
Vers 21h, je passe l’occidentale de Sein.
Il y a une longue houle qui secoue le bateau à chaque creux de vague. Je roule le gennaker, j’empanne, j’envoie le spi médium.
Loïc sur le 821 est bien revenu sur moi, je l’ai dans le tableau arrière.
A mesure que la nuit tombe, le vent refuse pour aller vers la bouée Basse du Lys.
Je pars régulièrement au lof, avec le spi qui claque, bateau sur la tranche.
Je décide alors de passer le code 5, le petit spi. C’est la bonne voile !
Là ça surfe à 12nds, c’est génial.
La nuit est tombée quand je passe la bouée, s’en suit alors un bord de près serré pénible pendant plus d’une heure, et enfin on choque un peu les écoutes pour rentrer dans la baie de Douarnenez après avoir passé Basse Vieille.
J’ai semé les Minis qui étaient derrière moi. Je me rends compte que j’aime bien finir les courses en me faisant un peu mal. Cette saison j’ai toujours fini comme ça, c’est le côté sprint final après un long effort qui me plaît bien.
J’arrive à Tréboul, je franchis la ligne heureux et triste à la fois.
Heureux de faire une trace propre, de bien gérer mon bateau, de tout ce que j’ai appris en 4 ans.
Triste de me dire que c’était sûrement ma dernière course à Douarnenez.